16.4.19

LES CHOSES

Le temps passe, mais pas vraiment. Les jours passent, les années se suivent, les siècles s'enchaînent. Les heures passent, le stress nous guide, nous fait peur, nous fait croire que tout est important, que les minutes compteront, que nos minutes sont limitées.

Les gens changent, mais pas vraiment. Le passé est troublant, le futur est inquiétant. La société évolue, les barèmes s’adaptent tranquillement, les valeurs se redéfinissent, ce qui était acceptable ne l’est plus. Ce qui sera inacceptable ne l’est pas encore.

Le monde change, mais pas vraiment. Les animaux restent des animaux, qu’on soit dans le passé, le présent, ou le futur. Les arbres sont des arbres, qu’on soit dans le passé, le présent, ou le futur.

On veut se faire croire que notre réalité est unique, que nos angoisses sont uniques à notre époque, à ce qu’on vit, au moment présent. Que notre expérience humaine est totalement ancrée dans une année, dans un siècle. Que la technologie, que les relations, que les superflus externes sont définitivement, irrévocablement la raison du pourquoi les choses sont ainsi.

Notre monde change, mais pas vraiment. On s’adapte, on s’améliore. On se tolère mieux, ou on se le faire croire de manière plus efficace. On se dit des choses pour se faire croire qu’on est spécial, même si tout le monde est spécial, depuis toujours.

On pense être mieux, être plus évolués, plus ceci et plus cela, mais on le sera toujours moins que ceux qui nous suivront, et toujours plus que ceux qui étaient avant. Les années qui passent, qui se ressemblent, qui s’opposent, qui se confrontent, qui s’accumulent sans qu’on s’en rende compte. Les gens du passé qui étaient comme nous, et qui ne sont plus, et qui pourtant nous ressemblent tellement sur le fond.

La forme, la forme change. Les relations sont différentes, se présentent sous une forme, sous une autre, ou une autre qu’on ne peut même pas encore imaginer.

Les relations sont différentes, mais pas vraiment. On cherche la même chose, que ce soit dans des siècles passés ou à venir. L’emballage change, mais l’intérieur reste le même. La façon de l’aborder, de le trouver, de le vivre, de le maintenir, change. Les gens restent plus longtemps, moins longtemps ensemble. Les gens s’aiment à deux, seuls, à plusieurs. Les gens ne s’aiment plus et s’adorent. Les gens vivent des choses extraordinaires, troublantes, horriblement ordinaires, qui sont fondamentalement les mêmes depuis des lunes, et qui resteront les mêmes, malgré tout ce qu’on peut se dire, ou se laisser dire.

L’humain s’adapte à son environnement, ou fait en sorte que son environnement s’adapte à lui. Son environnement change, le change, le fait être d’une manière ou d’une autre. Le pousse à aller dans une direction ou une autre. À devenir quelque chose, quelqu’un. Son environnement forme ce qu’il sera dans son environnement, ou dans les environnements où il ira, mais ne le changera pas. Pas vraiment.

L’intérieur, l’humain, le sentiment intérieur, l’expérience de ce que c’est d’être là, d’être vivant, de vivre les choses. Ça ne change pas. L’humain du passé, du présent et du futur restera toujours humain, vivra toujours les mêmes problèmes intérieurs, les mêmes expériences extraordinaires, aura toujours les mêmes réactions devant l’inconnu, les mêmes réactions devant le magnifique et l’horrible, devant les coups de foudre et devant les grandes tristesses.

L’humain change de peau continuellement depuis toujours, mais une peau ne reste qu’une peau. L’inexplicable complexité de l’intérieur, l’intérieur qui n’est pas vraiment dedans ou dehors, mais quelque part entre les deux, dans le mental, dans l’interconnexion, dans le tout et dans l’individualité qu’on ne peut s’expliquer, dans l’expérience totale, dans le tout qu’on forme, qu’on tente de mettre dans une case ou dans un contexte, alors qu’on ne pourra jamais totalement le faire, parce qu’on tente maladroitement de s’expliquer l’inexplicable.

Tout est mieux que le reste, mais pas vraiment.

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