Grandir. On commence tout petit. Un petit
rien, ou un petit tout. On grandit, dans notre tête et dans notre corps. On
veut devenir grand, on devient un des grands. On voudrait retrouver le temps où
on était petit. Ça nous manque, de pas être petit, mais on continue de grandir,
pas dans notre corps, mais dans notre âge. On devient plus vieux, on en a de
plus en plus grand à regarder derrière, et moins devant. Et puis on pense à
tout ça.
On se demande combien grand ou petit on
est. On se demande si on a été à la grandeur, si on le sera. On se demande si
on fait partie des grands, ou des petites gens. On pense aux grands qui ont été,
et desquels on ne sera probablement pas. Mais qu'au moins, on sera le
grand d'un autre, de nos petits qui deviendront grands.
Et puis y'a tout ce qui est plus grand que
nous, ce qu'on a de la misère à s'expliquer. Quand on se prend une grosse fin
de semaine là où on peut voir le ciel et tout ce qui est plus grand que lui.
Qu'on voit les petites lumières lointaines éclairer la nuit, couchés sur le
sol. Tout d'un coup, on se sent petit, très petit. Les petites étoiles qui sont
infiniment plus grandes que nous, qui existaient y'a longtemps, des fois
toujours, et desquelles rien de plus qu'une faible lumière qui se rend à nos yeux.
Et c'est d'une magnitude de grandeur qu'on
peut à peine s'imaginer. On se dit souvent être un grain de sable dans
l'Univers, mais même ça, c'est généreux. On est si petits, des micro-organismes
comparativement à certains astres. Les vrais, les choses lointaines qui seront
jamais rien de plus que des objets qu'on voit dans un énorme télescope, pas ceux de l'horoscope.
Notre immense Terre, celle de qui on rêve
faire le tour au moins une fois avant de s'en retourner. Celle qui est la scène
de toutes nos joies, de nos peines, de nos réalisations, de nos guerres, de nos
victoires, de nombreuses défaites, d'inventions qui font en sorte qu'on se
comprend mieux, qu'on comprend mieux ce qui est autour de nous, même si des
fois c'est tellement grand que notre petit cerveau arrive pas parfaitement bien
à tout comprendre.
Comme demander à du plancton d'expliquer
les montées et les chutes d'empires, les civilisations et les religions.
Réaliser qu'on est excessivement plus
grands que certaines choses, et profondément plus petits que d'autres. Se
remettre dans un contexte qui pour un moment nous fait un peu flotter dans
notre tête, qui nous amène dans un état d'esprit où on peut seulement tenter
d'imaginer ce à quoi on sera jamais confrontés. Comme une étoile mille cinq
cents fois plus grande que notre Soleil. Une échelle qu'on se dit capable
d'imaginer, sans jamais vraiment en
comprendre l'ampleur.
C'est comme ça qu'on commence tout petit.
Qu'on devient ensuite un peu plus grand, mais jamais très grand. Peut-être plus
que d'autres, mais qu'on reste quand même petit. Et c'est pourtant comme ça
qu'on vit tous plein de changements à notre petite échelle où toutes les
métaphores cosmiques se vaudraient autant les unes que les autres. Puisque tout se
répète perpétuellement, du plus petit au plus grand.
Et le réaliser, qu'on est tous plus petits
que grands.
Et retrouver à ce moment une parcelle de
modestie face à sa grandeur.